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COLETTE EN RHODESIA

une huile analogue à celle des amandes douces.

Les tiges du coudrier droites, longues et flexibles sont employées pour faire des fourches, des cercles, des bâtons, des lignes. Le bois de coudrier, autrefois réputé sacré ou peu s’en faut, servait de bâton de commandement et de baguette divinatoire.


mm(La suite prochainement.)
Ed. Grimard.mm

LES CHERCHEURS D’OR DE L’AFRIQUE AUSTRALE

COLETTE EN RHODESIA
(La guerre au Transvaal)
Par ANDRÉ LAURIE


XIV

Agrippa Mauvilain.


Assis dans la tranchée, sous la crête du kopje, Mauvilain et Weber causaient avec animation. Depuis quelques jours, depuis l’heure même où il avait vu l’obus unique du vieil inventeur produire dans les rangs des Anglais ces ravages terrifiants, le Boer avait désiré cet entretien, et, par une hésitation bien étrangère à sa nature, n’avait encore osé l’aborder. C’est que jamais auparavant le rigide huguenot n’avait même envisagé la possibilité d’une démarche qui ne fût pas strictement équitable ou honnête, et ce qu’il préméditait ne pouvait, comment qu’il le tournât, lui sembler entièrement justifiable.

Après avoir devisé quelques instants sur les effets foudroyants de l’obus de bois, sur la mort instantanée des victimes, sur le se cours vraiment providentiel que le nouvel engin avait apporté aux Boers, voyant que Weber ne semblait pas vouloir mordre à l’hameçon ou lui épargner la moitié du chemin. Agrippa, peu diplomate de sa nature, répugnant aux chemins détournés, se décida brusquement à aller droit au but :

« C’est vous qui avez inventé cet explosif ?

— C’est Henri Massey.

— Vous en avez des provisions à Massey-Dorp ?

— Deux cents sacs de cinquante kilogrammes, confessa Weber, ingénu et sincère.

— Il faudra nous les céder. Je vous les achète à votre prix, au nom du gouvernement transvaalien…

— Hein ?… quoi ?… que dites-vous ?… Impossible !… fit Weber, sortant tout à coup de la placidité qui était son élément coutumier.

Impossible ?… répéta le Boer. Et pourquoi ?

— D’abord je ne suis pas propriétaire de la poudre K — nous l’appelons ainsi.

— C’est à Henri Massey qu’il faudra s’adresser ?

— Il vous dira comme moi : Impossible ! Il ne pourrait, sans manquer gravement à la neutralité que nous impose notre situation toute particulière, livrer ou vendre à l’un des belligérants un moyen d’action aussi redoutable.

— La neutralité !… répéta le Boer avec violence. Trouvez-vous donc que les Anglais l’aient gardée vis-à-vis de vous ?… Et ce vol de vos obus, de votre canon ?… Et ce rapt de votre bête de somme ?… Et cet enlèvement de l’enfant ?… Pour quoi les comptez-vous ?

— Les Anglais ne sauraient être tenus responsables de ces faits. Benoni seul est criminel.

— Cela vous plaît à dire. En tout délit ou crime quelconque, il faut regarder surtout à qui il profite, pour désigner le coupable. Me voudriez-vous soutenir que le sieur Benoni emportait ces obus pour son usage personnel ? Allez ! il avait reçu des ordres, ou obtenu une permission, et sans nul doute touché les trente deniers de Judas.

— C’est, en effet, probable, dit le bon Weber simplement. Mais je vous ferai observer, à mon tour, que ce délit qui vous parait si