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ED. GRIMARD

— Oh ! moi, Madame la princesse, moi ! dit en s’élançant dans les jupes d’Annette un ravissant petit marchand de jambons de six ans. Moi !… Je sais très bien crier, même en français.

— C’est cela, Georgy ! » approuva l’assistance avec un fou rire, tandis que Mlle François embrassait l’enfant, à qui ensuite on expliqua ce qu’il aurait à faire.

Quand la vieille marchande arriva, elle était accompagnée de deux hommes et d’un notaire. Les hommes portaient des paniers remplis des fleurs les plus rares, venues de chez Labrousse ; le notaire avait sous le bras un portefeuille de maroquin.

« Monsieur, dit Michel en allant à lui, vous nous excuserez. Il se produit un heureux incident qui va retarder ce que nous voulions faire. Ayez la bonté de vous asseoir ici et nous passerons ensuite dans notre appartement pour terminer. »

Ces paroles mystérieuses, entendues par quelques personnes et répétées aux autres, éveillèrent la curiosité générale et celle-ci fut aiguisée quand le diplomate russe, très fier de sa perspicacité, murmura :

« J’en étais sûr. »

Les fleurs déballées, les enchères commencèrent.

Comme toujours, les premiers lots furent adjugés à des prix raisonnables. Georgy faisait merveille et il lançait à pleine voix, avec un petit accent anglais très drôle, des phrases comme celle-ci : »

« À vingt francs le… le… enfin ça qui est brun et jaune.

— Vingt-cinq francs, Georgy…

— À vingt-cinq francs, la orchidée. »

Ou bien :

« Oui, oui, madame la princesse, là-bas, le monsieur a dit quarante francs pour le… le chose blanc ! »

Et encore, s’adressant aux Colaho :

« Eh bien, pourquoi vous n’achetez rien, tous les deux ? »

Les bottes de fleurs se succédaient les unes aux autres, passaient des mains d’Annette dans celles de l’expert, puis dans celles de l’acquéreur et Georgy criait comme un bienheureux, s’amusant follement, se trompant de chiffres, et faisant adjuger pour cent dollars à son père le paquet de roses qui avait atteint cent francs.

La fièvre des enchères montait ; le bonnetier anglais, le fabricant de jambons et l’armateur se piquaient d’honneur ; la dernière gerbe de fleurs fut chaudement disputée entre eux et adjugée à l’armateur pour un prix que les Colaho jugèrent scandaleux. Georgy n’était pas content et jeta à l’auteur de ses jours un « Oh ! papa ! Indeed ! » gros de reproches.

Quand tout fut fini, Michel, après avoir fait signe au notaire, se leva et se dirigea vers la porte, tandis qu’Annette disait :

« Merci à tous et de tout notre cœur. Ce soir, après le dîner, si vous le voulez bien, je vous raconterai une courte histoire. Pour le moment nous allons, mon frère et moi, terminer une petite affaire avec monsieur. Venez avec nous, ma mère Mathieu. »


De Granvelle.

(La fin prochainement)



MONOGRAPHIES VÉGÉTALES


LA PLANTE BIENFAITRICE (Suite.)

Mais nous avons hâte d’arriver au plus célèbre de tous les conifères.

Le Cèdre (Cedrus) pourrait être appelé le « roi des montagnes ».

Les cèdres du Liban ! Qui ne connaît cette sorte de légende, suivant laquelle sept de ces arbres magnifiques, contemporains du roi Salomon, se voient encore, assure-t-on, sur la montagne dont ils ont conservé le nom ? Quoi qu’il en soit, cette légende pourrait être