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Cependant la matinée s’avançait, et le ciel ne se dégageait pas. Une reconnaissance, faite par M. Bourcart et le second autour du Saint-Enoch dans un rayon d’une demi-encâblure, ne révéla rien touchant la nature et la position de l’écueil.

Avant tout, il eût fallu constater s’il se trouvait à proximité d’une terre où les embarcations pourraient accoster, en cas qu’il devînt nécessaire d’abandonner le navire. Il est vrai, qu’il se rencontrât un continent ou un archipel en ces parages, M. Bourcart ne pouvait l’admettre, et, au docteur qui l’interrogeait à cet égard :

« Non, monsieur Filhiol, non, répondit-il d’un ton affirmatif, il y a quelques jours, j’ai obtenu une bonne observation, je le répète… Je viens de revoir mes calculs, ils sont exacts et nous devons être à deux cents milles au moins de l’extrême pointe des Kouriles.

— J’en reviens donc à mon explication…, reprit le docteur Filhiol. Il a dû se produire un exhaussement du sous-sol marin, contre lequel s’est heurté le Saint-Enoch

— C’est possible, répliqua M. Bourcart, et je me refuse à croire qu’une erreur ou une déviation de route nous aient rejetés à une telle distance dans le nord. »

C’était vraiment une déplorable malchance que le vent ne parût pas devoir se lever. D’abord il aurait balayé les vapeurs et dégagé l’horizon. Puis, s’il avait soufflé de la partie ouest, l’équipage, en coiffant les voiles sur les mâts, eût peut-être obligé le Saint-Enoch à s’arracher du seuil rocheux…

« Attendons… attendons, mes amis !… répétait le capitaine Bourcart, qui sentait s’accroître l’impatience et aussi l’inquiétude de ses hommes. J’espère que ce brouillard se dissipera dans l’après-midi, et nous serons fixés sur cette situation, dont, je l’espère, nous sortirons sans grand dommage ! »

Mais, lorsque les matelots et les novices regardaient Jean-Marie Cabidoulin, ils le