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MONOGRAPHIES VEGETALES

a, de toute antiquité, rendues précieuses pour la mâture des vaisseaux. D’autre part, la résine qu’elles renferment les rend à peu prés incorruptibles dans l’eau ; aussi, s’en servait-on pour la construction des carénes, où leur durée a été constatée par l’histoire de ce navire qui, submergé depuis treize cents ans,
Sapin ou Épicéa.
fut retiré de l’eau dans un parfait état de conservation.

Jusqu’au temps où l’on eut l’idée de brûler de l’huile ou du suif, on ne s’éclaira guère qu’avec des éclats de bois résineux dont on faisait des torches, en les faisant brûler dans une sorte de cage en fer, ainsi que cela se pratiquait encore, il y a quelques années, dans le royaume de Naples.

Aujourd’hui, le bois de pin est encore fort apprécié pour certaines constructions souterraines ou sous-marines, et particulièrement pour les poutres de pilotis. C’est surtout par la production de la résine que cet arbre se recommande a tous les soins de l’arboriculteur. Robuste, résistant aux vents de mer et s’accommodant des terrains sablonneux les plus stériles, il arrête les dunes et fertilise les landes dont il èpure l’atmosphère par ses émanations balsamiques.

Parmi les diverses espèces, citons, en première ligne, le Pin maritime, originaire du midi de l’Europe et dont on voit des forêts entières dans les Landes et sur les immenses dunes qui entourent le bassin d’Arcachon. C’est là qu’on voit les grands troncs de pins résiniers coupés de longues entailles verticales, au bas desquelles sont attachés de petits pots en terre où s’écoule lentement la précieuse térébenthine.

Autres espèces : le Pin sylvestre,, qui forme de vastes forêts sur les montagnes du nord de l’Europe ; le Pin de Corse, le plus grand de tous ; le Pin de Weymouth, importé d’Amérique par le lord de ce nom ; et, enfin, le Pin pignon, qui, entre tous ses con génères, se distingue par le vaste parasol que forme sa tête et dont tout le monde connaît l’effet pittoresque dans les paysages d’Italie.

Le Sapin ou Épicéa (Abies excelsa), famille des conifères, est comme le pin un arbre résineux ; mais là s’arrête la ressemblance. Élégance et majesté, grâce et puissance, tels sont les caractères de ce végétal magnifique. C’est au sein de ses forêts qu’il faut le voir étaler ses longues branches et dresser sa fière pyramide jusqu’à plus de quarante mètres de hauteur. Dans les Pyrénées, dans les Alpes, sur les Vosges, dans la Forêt Noire et, enfin, tout le long de la Suède et de la Norvège, s’étendent d’admirables agglomérations de grands sapins dont la majesté est indescriptible. Un vieux sapin, couvert de neige comme ceux qu’excellait à peindre le paysagiste Calame, est à coup sûr une des physionomies les plus remarquables parmi les plus beaux types du règne végétal. Et lorsque, par un de ces artifices du hasard qui abondent dans la nature, on trouve quelques-uns de ces beaux arbres accrochés au flanc d’une roche et surplombant quelque fougueuse cascade, le paysage revêt une telle expression de pittoresque grandiose, que le voyageur s’arrête surpris et rêveur dans le sentiment d’une admiration qui s’impose.

S’il vous prend jamais fantaisie de faire une visite aux Pyrénées et de vous rendre, par la route de montagne, de Bagnères-de-Bigorre à