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pas mis là à poste fixe. Lorsque les embarcations seraient amenées sur une baleine, soit à travers la lagune, soit en dehors, il aurait vite fait d’appareiller pour appuyer la chasse, si le vent soufflait du bon côté.

Quarante-huit heures après son arrivée, un trois-mâts se montra à quatre milles au large. On reconnut sans peine le navire anglais. Ainsi qu’on l’apprit par la suite, c’était le Repton, de Belfast, capitaine King, second Strok, qui venait commencer sa campagne dans la baie Marguerite.

Ce bâtiment ne cherchait point à prendre son mouillage dans la crique occupée par le Saint-Enoch. Il se dirigeait, au contraire, vers le fond de la lagune où illaissa tomber son ancre. Mais, il n’était distant que de deux milles et demi, on ne devait pas le perdre de vue.

Et, cette fois, le pavillon français ne le salua pas à son passage.

Quant aux autres bâtiments de nationalité américaine, ils croisaient sur les autres parages de la baie Marguerite, et on en pouvait tirer cette conclusion que les baleines ne l’avaient point définitivement quittée.

Dès le premier jour, en attendant que l’occasion s’offrît d’amener les pirogues, maître Cabidoulin, le charpentier Ferut et le forgeron Thomas, accompagnés de quelques matelots, vinrent s’installer à la lisière de la forêt, afin d’abattre des arbres. Il était urgent de renouveler la provision de bois, tant pour les besoins de la cuisine que pour alimenter le fourneau de la cabousse. C’est là un travail de grande importance que ne négligent jamais les capitaines baleiniers. Ce travail allait être favorisé, bien que la chaleur fût déjà forte. On ne saurait s’en étonner, puisque la baie Marguerite est à peu près traversée par le vingt-cinquième parallèle, et, dans l’hémisphère septentrional, cette latitude est celle du nord de l’Inde et de l’Afrique.

Le 25 mai, une heure avant le coucher du soleil, le harponneur Kardek, qui se tenait dans les barres du mât de misaine, aperçut plusieurs souffleurs à deux milles de la crique, sans doute à la recherche de hauts-fonds convenables pour les baleineaux. Il fut donc décidé que, le lendemain, dès la première heure, les pirogues seraient parées et, sans doute, les autres navires se disposeraient pour la pêche.

Ce soir-là, lorsque M. Filhiol demanda au capitaine Bourcart si cette pêche s’effectuerait dans les mêmes conditions qu’à la Nouvelle-Zélande, il en reçut cette réponse :