« Alors, dit-elle les larmes aux yeux, je n’aurai pas grand’chose à offrir, car, pour terminer tant de choses, il me faudrait travailler jusqu’à la cueillette des olives.
— Oui, si tu travaillais toute seule, dit Irène ; mais à nous trois nous irons plus vite. Veux-tu finir la bourse perlée, Nad ?
— Oui, oui, et le vide-poche aussi.
— Eh bien, moi qui travaille tous les jours pendant une heure et demie, j’achèverai le reste, excepté les chaussons que je laisse à Marthe. »
La brunette ne se possédait pas de joie :
« Comment ! tu feras tout cela pour moi ! Quelle gentille cousinette ! Comme c’est heureux que tu viennes enfin chez nous !… Nad, aide-moi à lui mettre les ouvrages dans un carton ! »
Marthe prit et rejeta successivement plusieurs cartons avant de trouver celui où elle empila ses futurs lots ; puis Irène embrassa ses deux amies et partit à la hâte, tout en priant de ne pas parler à Mme Brial de la bouteille brisée par la faute de Jacques.
« Comme elle a peur de faire punir les autres !… Décidément elle est meilleure que moi ! » murmura Marthe en la regardant s’éloigner.
CHAPITRE XII
Ce jour-là, le mistral soufflait, secouant les grands arbres, sifflant à travers les branches ; Irène, qui avait porté le repas de ses oiseaux, rentrait, les cheveux ébouriffés et son chapeau sur les épaules :
« Oh ! Marie-Louise !… entends-tu le bruit là-haut ? dit-elle avec inquiétude, comme elle posait son panier dans la cuisine.
— Eh ! pécaïre ! je l’entends depuis une heure…
— Mon Dieu, si c’était le mistral qui arrache les tuiles ou qui enlève le toit comme chez Mme Guide ?
— Nenni, mademoiselle, votre tante fait le vacarme toute seule dans la chambre de feu votre grand-père ; elle roule les meubles et regarde derrière, renverse les tiroirs pour voir plus vite ce qu’il y a dedans… écoutez, la voilà qui tire l’escabeau devant la grande armoire de chêne ; il paraît qu’elle cherche un morceau de bois, elle vous appelle encore, c’est au moins la dixième fois !