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MICHEL ANTAR


II. — DJENIEN-BOU-REZG.


Au sortir d’Aïn-Sefra la route longe presque parallèlement le massif du Mekter dont la ligne, assombrie dans sa partie supérieure, s’éclaire, vers le bas, de sa chenille d’or pâle. Assez longtemps elle file au travers des solitudes arides, pas précisément faites pour égayer l’esprit. Peu de détails rompent la monotonie de ses abords. Parfois quelques pauvres tentes de bergers se cachent dans le creux d’un ravin ; parfois des murs croulants s’entrevoient, tels ceux qui restent du poste de Hassi Slimane.

Elle entre soudain résolument dans la montagne. Tantôt, grimpant avec peine, elle sinue au travers des escarpements, tantôt, se hâtant, elle court au fond de quelque étroite vallée. Et toujours, sur une longueur de douze kilomètres, elle reste dans une contrée sauvage et terriblement impressionnante.

Oh ! le merveilleux pays pour les coupeurs de bourse ! Avec quelle facilité ils y abattraient et dépouilleraient le passant isolé ! En un clin d’œil ils auraient disparu dans la brousse, à droite, du côté du Maroc ; en un clin d’œil, et bien avant l’arrivée des… carabiniers.


KSAR DE SFISSIFA

L’on comprend donc aisément l’utilité, dans ce coupe-gorge sans fin, des deux postes indigènes de Ben-Ikhou et Founassa.

Ben-Ikhou. — Un caravansérail qui dresse contre la route, auprès de la porte d’entrée du défilé, peut-on dire, ses murs blancs percés de créneaux et surmontés de toits aux tuiles rouges.

Founassa. — Dans un élargissement de l’étroit passage. À gauche, le bordj, où tenait autrefois garnison une section de zéphyrs[1]. À droite, un groupe de palmiers, une source abondante et des abreuvoirs. Des jardins aussi, qui conservent toujours les vestiges du séjour des « zeph » : allées dessinées avec goût ; agréables tonnelles ; piscine couverte, creusée auprès d’un gourbi confortable meublé d’une table centrale en pierre — la salle à manger tout contre la salle de bains ; quels sybarites ! — Mais aussi, à quelques pas, un petit cimetière où dorment cinq ou six soldats. Un cimetière, le banal accessoire de la mise

  1. « Zéphyrs » ou « zeph », noms donnés aux hommes des bataillons d’Afrique.