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A. MOUANS

L’igname à racine blanche qui croit au Japon a reçu le nom de Dioscorca japonica. Dans l’Europe méridionale, l’igname de Chine a pris une certaine extension depuis quelques années et pourra figurer bientôt, sans doute, parmi les meilleures plantes alimentaires.

L’on extrait des rhizomes de l’igname une fécule blanche analogue à celle de l’arrow-root du Brésil et de l’Inde et dont on fait une sorte de tapioca de qualité supérieure.

Éd. Grimard.

(La suite prochainement.)


LA FOUX-AUX-ROSES

Par A. MOUANS

CHAPITRE IV


Pendant les jours qui suivirent, Irène pensa plus d’une fois à la visite des étrangers et à la collation que tante Dorothée leur avait offerte de si bonne grâce. Elle se rappelait les détails enchanteurs de cette fameuse réception, se revoyait présentant à la ronde les fougassettes, croyait encore entendre M. Jouvenet déclarer la limonade exquise ; mais par-dessus tout c’était la voix de Nadine, cette petite voix frêle et douce, dont le souvenir la caressait, et chaque mot échangé sous les orangers avec la fillette lui suggérait mille réflexions.

« Elle m’a tutoyée, murmurait l’enfant solitaire ; oui, Nadine Jouvenet m’a dit « tu » et m’a embrassée comme si j’étais son amie depuis longtemps… et quand je lui ai demandé de l’être un peu, elle n’a pas refusé, au contraire !… Sa maman doit être bonne aussi… Que je serai contente si elle lui permet de revenir me voir !… Qui sait ce qu’en penserait Marthe ?… Elle comprendrait peut-être que ce n’est pas ma faute si la Foux-aux-Roses a fâché nos familles, et Nadine se chargerait bien de lui dire que je voudrais tant qu’elle m’aimât à son tour… »

L’esprit plein de ces réflexions, Irène n’était plus la même fillette rieuse et insouciante.

« Qu’as-tu, petite, tu ne jases pas comme d’habitude ? lui dit Mlle  Lissac étonnée.

— Je n’ai rien, tante Dor ; seulement, je pense à Nadine, et je me demande quand elle reviendra me voir.

— Revenir chez nous… cette enfant !… et pour te voir ! En vérité, tu déraisonnes, ma fille ; me crois-tu donc disposée à permettre qu’on envahisse ainsi ma maison !… et puis, te figures-tu que des enfants gâtés comme doivent l’être ceux-là trouvent beaucoup de plaisir chez nous ! Dans les villas que louent les étrangers, on donne des fêtes, c’est bien mieux leur affaire ; tandis que la nôtre est de vivre tranquilles dans notre campagne.

— Pourtant, insinua la petite fille, tu paraissais très contente de causer avec Mme  Francœur, qui a tout à fait tes goûts… Tu sais, tante, elle non plus, n’aime pas les chemins de fer…

— On est toujours heureux de rencontrer des gens sensés ; mais cette dame a beau être très aimable, je ne l’ai pas invitée à revenir. Allons, assez là-dessus ; tâche de chasser ces idées-là. Je te le répète, il n’est pas probable que nos visiteurs de l’autre jour pensent encore à nous. »

Et, tournant le dos à sa nièce, Mlle  Dorothée entreprit l’examen d’un plant de vignes qui commençaient à bourgeonner.

Irène, le cœur gros, retourna lentement s’asseoir devant la maison où l’attendait sa tâche de couture ; tout en tirant l’aiguille, elle se posait mille questions inquiètes.

Est-ce que sa tante disait vrai ? Est-ce que Nadine l’avait oubliée si vite ? Et cette visite qui, à ses yeux, prenait l’importance d’un grand événement, serait-elle la seule qu’on dût recevoir à la bastide ?

Hélas ! Mlle  Dorothée avait sans doute raison, car les jours s’écoulèrent, et Irène eut beau se promener sur les bords de la Foux ; elle vit bien de l’autre côté passer des