Page:Maeterlinck - Les Parfums, paru dans Le Figaro du 1er mars 1907.djvu/3

Cette page a été validée par deux contributeurs.

nigmes aussi insolubles. Nous ignorons à peu près entièrement l’intention de cette zone d’air férié et invisiblement magnifique que les corolles répandent autour d’elles. Il est fort douteux qu’elle serve principalement à attirer les insectes. D’abord, beaucoup de fleurs, parmi les plus odorantes, n’admettent pas la fécondation croisée, de sorte que la visite de l’abeille ou du papillon leur est indifférente ou importune. Ensuite, ce qui appelle les insectes c’est uniquement le pollen et le nectar, qui généralement n’ont pas d’odeur sensible. Aussi les voyons-nous négliger les fleurs les plus délicieusement parfumées, telles que la rose et l’œillet, pour assiéger en foule celles de l’érable ou du coudrier, dont l’arome est pour ainsi dire nul.

Avouons donc que nous ne savons pas encore en quoi les parfums sont utiles à la fleur, de même que nous ignorons pourquoi nous les percevons. L’odorat est effectivement le plus inexpliqué de nos sens. Il est évident que la vue, l’ouïe, le toucher et le goût sont indispensables à notre vie animale. Seule une longue éducation nous apprend à jouir avec désintéressement des formes, des couleurs et des sons. Du reste notre odorat exerce aussi d’importan-