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reparaître parmi nous afin d’y achever leur carrière ? Si l’on pouvait suivre des yeux ce qui se passe dans le monde idéal qui nous domine de toutes parts, on constaterait sans doute qu’il en va de même des forces morales qui semblent se perdre sur les champs de carnage. Elles savent où aller, elles connaissent leur but et elles n’hésitent point. Ce que nos admirables morts abandonnent, c’est à nous qu’ils le lèguent ; et quand ils périssent pour nous, ce n’est pas métaphoriquement et d’une manière détournée, mais très réellement et d’une façon directe qu’ils nous laissent leur vie. Tout homme qui succombe dans un acte de gloire émet une vertu qui redescend sur nous ; et dans la violence d’une fin prématurée, rien ne s’égare et rien ne s’évapore. Il donne en grand et d’un seul coup ce qu’il nous eût donné dans une longue existence de devoir et d’amour. La mort n’entame pas