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s’émeuvent pas des bruits que nous produisons autour de la ruche, mais elles jugent peut-être que ces bruits ne sont pas de leur monde et n’ont aucun intérêt pour elles. Il est vraisemblable que, de notre côté, nous n’entendons qu’une minime partie de ce qu’elles disent, et qu’elles émettent une foule d’harmonies que nos organes ne sont pas faits pour percevoir. En tout cas, nous verrons plus loin qu’elles savent s’entendre et se concerter avec une rapidité parfois prodigieuse, et quand, par exemple, le grand pilleur de miel, l’énorme Sphinx Atropos, le papillon sinistre qui porte sur le dos une tête de mort, pénètre dans la ruche au murmure d’une sorte d’incantation irrésistible qui lui est propre, de proche en proche la nouvelle circule et, des gardes de l’entrée aux dernières ouvrières qui travaillent, là-bas, sur les derniers rayons, tout le peuple tressaille.

VI

On a cru longtemps qu’en abandonnant les trésors de leur royaume, pour s’élancer ainsi dans la vie incertaine, les sages mouches à