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treint se fût peu à peu fixée dans nos races septentrionales. Mais ce sont précisément ces ruches prudentes, opulentes et acclimatées que l’homme a toujours détruites pour s’emparer de leur trésor. Il ne laissait et ne laisse encore, dans la pratique routinière, survivre que les colonies, souches épuisées, essaims secondaires ou tertiaires, qui ont à peu près de quoi passer l’hiver ou auxquelles il donne quelques déchets de miel pour compléter leurs misérables provisions. Il en est résulté que l’espèce s’est probablement affaiblie, que la tendance à l’essaimage excessif s’est héréditairement développée et qu’aujourd’hui presque toutes nos abeilles, surtout nos abeilles noires, essaiment trop. Depuis quelques années, les méthodes nouvelles de l’apiculture « mobiliste » sont venues combattre cette habitude dangereuse, et quand on voit avec quelle rapidité la sélection artificielle agit sur la plupart de nos animaux domestiques, sur les bœufs, les chiens, les moutons, les chevaux, les pigeons, pour ne les pas citer tous, il est permis de croire qu’avant peu nous aurons une race d’abeilles qui renoncera presque entièrement à l’essaimage naturel et tournera toute son activité à la récolte du miel et du pollen.