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printemps secret émane du beau miel qui n’est qu’un rayon de chaleur autrefois transmué, qui maintenant revient à sa forme première. Il circule dans la sphère comme un sang généreux. Les abeilles qui se tiennent sur les alvéoles débordants l’offrent à leurs voisines, qui le transmettent à leur tour. Il passe ainsi de griffes en griffes, de bouche en bouche, et gagne les extrémités du groupe, qui n’a qu’une pensée et une destinée éparse et réunie en des milliers de cœurs. Il tient lieu de soleil et de fleurs, jusqu’à ce que son frère aîné, le soleil véritable du grand printemps réel, glissant par la porte entr’ouverte ses premiers regards attiédis où renaissent les violettes et les anémones, réveille doucement les ouvrières pour leur montrer que l’azur a repris sa place sur le monde, et que le cercle ininterrompu qui joint la mort à la vie, vient de faire un tour sur lui-même et de se ranimer.