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devenues maternelles, prend elle-même le soin d’introduire et d’unir pour un long avenir inséparable, dans un seul et même corps, deux petites vies fragiles.

La vérité profonde n’a pas cette poésie, elle en possède une autre que nous sommes moins aptes à saisir ; mais que nous finirons peut-être par comprendre et aimer. La nature ne s’est pas souciée de procurer à ces deux « raccourcis d’atome », comme les appellerait Pascal, un mariage resplendissant, une idéale minute d’amour. Elle n’a eu en vue, nous l’avons déjà dit, que l’amélioration de l’espèce par la fécondation croisée. Pour l’assurer, elle a disposé l’organe du mâle d’une façon si particulière qu’il lui est impossible d’en faire usage ailleurs que dans l’espace. Il faut d’abord que par un vol prolongé il dilate complètement ses deux grands sacs trachéens. Ces énormes ampoules qui se gorgent d’azur, refoulent alors les parties basses de l’abdomen et permettent l’exsertion de l’organe. C’est là tout le secret physiologique, assez vulgaire diront les uns, presque fâcheux affirmeront les autres, de l’essor admirable des amants, de l’éblouissante poursuite de ces noces magnifiques.