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nous semble inconsciente, mais nécessairement sage, puisque la vie qu’elle organise et qu’elle maintient lui donne toujours raison, il arrive donc qu’elle tombe dans l’erreur ? Sa raison suprême, que nous invoquons quand nous atteignons les limites de la nôtre, aurait donc des défaillances ? Et si elle en a, qui les redresse ?

Mais revenons à son intervention irrésistible qui prend la forme de la parthénogenèse. Ne l’oublions point, ces problèmes que nous rencontrons dans un monde qui paraît très éloigné du nôtre, nous touchent de fort près. D’abord, il est probable qu’en notre propre corps, qui nous rend si vains, tout se passe de la même façon. La volonté ou l’esprit de la nature opérant en notre estomac, en notre cœur et dans la partie inconsciente de notre cerveau, ne doit guère différer de l’esprit ou de la volonté qu’elle a mis dans les animaux les plus rudimentaires, les plantes et les minéraux mêmes. Ensuite, qui oserait affirmer que des interventions plus secrètes mais non moins dangereuses ne se produisent jamais dans la sphère consciente de l’homme ? Dans le cas qui nous occupe, qui a raison, en fin de compte, de la nature ou de l’abeille ? Qu’arriverait-il si celle-ci, plus docile ou plus intelligente, comprenant trop parfaite-