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XIII

Nous prenons ici sur le fait, dans son intervention, une volonté supérieure, mais peut-être imprudente, qui contrarie irrésistiblement la volonté intelligente d’une vie. De pareilles interventions sont assez fréquentes dans le monde des insectes. Il est curieux de les y étudier. Ce monde étant plus peuplé, plus complexe que les autres, souvent on y saisit mieux certains désirs de la nature, et on l’y surprend au milieu d’expériences qu’on pourrait croire inachevées. Elle a, par exemple, un grand désir général, qu’elle manifeste partout, — à savoir : l’amélioration de chaque espèce par le triomphe du plus fort. D’habitude la lutte est bien organisée. L’hécatombe des faibles est énorme, cela importe peu pourvu que la récompense du vainqueur soit efficace et sûre. Mais il est des cas où l’on dirait qu’elle n’a pas encore eu le temps de débrouiller ses combinaisons, où la récompense est impossible, où le sort du vainqueur est aussi funeste que celui des vaincus. Et pour ne pas quitter nos abeilles, je ne sache rien de plus frappant