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cellules de mâles, si l’on n’en a pas laissé d’autres à sa disposition.

Ensuite, les belles observations de M. Fabre sur les Osmies, qui sont des abeilles sauvages et solitaires de la famille des Gastrilégides, prouvent à l’évidence que non seulement l’Osmie connaît d’avance le sexe de l’œuf qu’elle pondra, mais que ce sexe est facultatif pour la mère qui le détermine suivant l’espace dont elle dispose, « espace fréquemment fortuit et non modifiable, » établissant ici un mâle, là une femelle. Je n’entrerai pas dans le détail des expériences du grand entomologiste français. Elles sont extrêmement minutieuses et nous entraîneraient trop loin. Mais quelle que soit l’hypothèse acceptée, l’une ou l’autre expliquerait fort bien, en dehors de toute intelligence de l’avenir, la propension de la reine à pondre dans des cellules d’ouvrières.

Il est probable que cette mère-esclave que nous sommes portés à plaindre, mais qui est peut-être une grande amoureuse, une grande voluptueuse, éprouve dans l’union du principe mâle et femelle qui s’opère dans son être, une certaine jouissance, et comme un arrière-goût de l’ivresse du vol nuptial unique dans sa vie. Ici encore, la nature, qui n’est jamais si ingé-