Page:Maeterlinck - La Vie des abeilles.djvu/165

Cette page a été validée par deux contributeurs.

attentives, les petites têtes aux énormes yeux noirs des gardes de son escorte, l’enserrent d’un cercle passionné, lui soutiennent les pattes, lui caressent les ailes et agitent sur elle leurs fébriles antennes, comme pour l’encourager, la presser et la féliciter.

On reconnaît aisément l’endroit où elle se trouve à cette espèce de cocarde étoilée, ou plutôt à cette broche ovale dont elle est la topaze centrale et qui ressemble assez aux imposantes broches que portaient nos grand’mères. Il est d’ailleurs remarquable, puisque s’offre l’occasion de le remarquer, que les ouvrières évitent toujours de tourner le dos à la reine. Sitôt qu’elle s’approche d’un groupe, toutes s’arrangent de façon à lui présenter invariablement les yeux et les antennes et marchent devant elle à reculons. C’est un signe de respect ou plutôt de sollicitude qui, pour invraisemblable qu’il paraisse, n’en est pas moins constant et tout à fait général. Mais revenons à notre souveraine. Souvent, pendant le léger spasme qui accompagne visiblement l’émission de l’œuf, une de ses filles la saisit dans ses bras, et front contre front, bouche contre bouche, semble lui parler bas. Elle, assez indifférente à ces témoignages un peu effrénés,