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appeler son estomac personnel ; il reste dans le jabot, le premier estomac, qui est, si l’on peut ainsi parler, l’estomac de la communauté. Sitôt que ce réservoir est rempli, l’abeille s’éloignera, mais non pas directement et étourdiment comme ferait un papillon ou une mouche. Au contraire, vous la verrez voler quelques instants à reculons, en un va-et-vient attentif, dans l’embrasure de la fenêtre ou autour de votre table, la face tournée vers l’appartement.

Elle reconnaît les lieux et fixe en sa mémoire la position exacte du trésor. Ensuite elle se rend à la ruche, y dégorge son butin dans l’une des cellules du grenier, pour revenir trois ou quatre minutes après, reprendre une nouvelle charge sur le seuil de la fenêtre providentielle. De cinq en cinq minutes, tant qu’il y aura du miel, jusqu’au soir s’il le faut, sans s’interrompre, sans prendre de repos, elle fera ainsi des voyages réguliers de la fenêtre à la ruche et de la ruche à la fenêtre.