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compagnie. Et furent ces raisons bien pesées, esquelles ilz remarquèrent tous leur propre intérêt plus que le sien, estant certain que, s’y trouvant, il se rendoit tousjours tant plus considérable à l’endroit de ceux qui ne l’aymoient pas, et leur faisoit voir que sa créance et réputation estoit toute entyère entre les gens de bien ; ce que touteffois il vouloit post-poser au publiq. Et fut nommé le sieur Baron de la Hairie, député de la Province de Guienne, pour le venir trouver en la ville de Tonneinx sur Garonne, et recevoir ses advis sur divers poinctz, lesquelz il lui bailla escriptz de sa main pour iceux présenter à la compagnie. Son voyage touteffois, pour s’estre rencontré avec la ditte assemblée, ne laissa d’estre mal pris en court, soit qu’on creust la calomnie, soit qu’on voulut faire mine de la croire.

Or prit il occasion, se voyant acheminé sy avant, de visiter la plus part des terres de l’ancien domaine de Navarre, selon le deu de sa charge, et y esbaucha divers affaires ; mesme se transporta aux Montz Pyrénées pour juger sur les lieux ce qui se pouvoit espérer de la recherche des mines et minéraux en Bigorre, Aure, Barousse, Nebouzan, Couzerans, Foix, etc. Et en fit faire plusieurs essaiz qui promettent quelque chose, dont aussy il donna advis au Roy, et s’en verront les fruictz en leur temps  ; mais sa principale utilité et consolation fut de revoir ses anciens amys qui, par toutes les villes et Eglizes, le recevoient avec larmes de joye, luy faisoient voir par effect qu’il n’y a amytié que de gens de bien qui, au milieu de la plus grande desfaveur, ne peuvent ny mesconnoitre la vertu, ny dissimuler leur affec-