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toute ceste maison de laquelle je receu tant d’amityé et d’ayde en ce besoing que, outre la parenté qui est entre madame la Présidente Tambonneau et moy, il ne sera jour de ma vie que je ne leur demeure très obligée. Le mardy suivant, madamoyselle de la Borde, ma mère, ayant ung peu reprins alaine et trouvé moyen, pour sauver mes frères de ce naufrage, de les faire aller à la messe, pensa me sauver par ce mesme chemin, et m’en fît parler par M. de Paroy, nostre cousin, lequel, après plusieurs propos que nous eusmes ensemble, m’en trouva, par la grâce de Dieu, très eslongnée. Le mercredy matin, après que ma mère eut uzé de quelques moyens pour m’y faire condescendre, n’ayant de moy telle response qu’elle vouloit, mais seulement une supplication pour me faire sortir de Paris, m’envoya dire qu’elle seroit contrainte de me renvoïer ma fille ; je ne peu que respondre sy non que je la prendrois entre mes bras, et qu’en ce cas nous nous lairrions massacrer tous deux ensemble ; mais à la mesme heure, je me résolus de partir de Paris quoy qu’il m’en deust avenir, et priay celui qui m’avoit fait ce message d’aller arrester une place pour moy[1] aux Corbillard, ou en quelque bateau montant sur la rivière de Sene. Le temps que je fus en ce logis du marchand de bled, ce ne fut sans pene ; j’estois logée en une chambre au dessus d’une que tenoit madame de Foissy qui empeschoit[2] de pouvoir marcher en la ditte chambre, et n’y ozoit on aussy

  1. Le manuscrit de la Bibliothèque impériale et l’édition de M. Auguis portent : « au bateau du Corbillard, ou en quelque autre. »
  2. Le manuscrit de la Bibliothèque impériale et l’édition de M. Auguis portent : « qui empeschoit, craignant d’estre descouverte. »