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dent en la chambre des comptes de Paris, qu’il exerça avec beaucoup d’intégrité, fort aymé des contables qui avoient affaire à luy, hayssant les présans et refusant des parties jusqu’à du fruit et confitures.

Ung peu devant les premiers troubles, feu monseigneur le Prince de Condé et madame la Princesse sa femme prièrent mon père de leur donner logis pour estre plus près du Louvre. Il estoit logé à la Chasse, rue des Bourdonnetz ; monseigneur le Prince estant là dedans y fit faire des presches, ce qui fut fort remarqué, tost après que les premiers troubles survinrent en France. Car ayant iceluy esté malade, et estant allé prendre l’air à Arcueil où il avoit quelque maison, il y fut environné de troys ou quatre mil hommes qui estoient sortis de Paris pour le prendre. Quoy voyant, fit deffoncer quelques pièces de vin pour donner aux soldats, et demanda à parler à ceux qui y commandoient. Le sieur Marcel, lors Prévost des Marchands de Paris, y estoit qui professoit touteffois qu’il n’avoit pris ceste charge que pour luy sauver la vie, et le capitaine ausquels il bailla ce qu’il avoit de meilleur comme vaisselle d’argent et bagues pour les sauver du pillage de ceste commune qui estoit avec eux, qui s’étoit déjà saisie de la pluspart de ses serviteurs, les appellant prédicans et huguenots, gens touteffois qui alloient tous les jours à la messe et n’avoient la pluspart aucune congnoissance de la vérité. Feu mon père pensant monter à cheval fut démonté, mené à pied, tantost luy présentoit on un pistolet à la gorge et tantost une dague, et ainsy arriva au Fauxbourg St Marceau où il demeura prisonnier. Monsr le Mareschal de Brissac,