fans enfans qui fuyoient le mesme naufrage au travers des ondes. Ce fut le 9e jour après le massacre. J’adjouteray qu’il m’a souvent dit qu’à ce propre moment qu’il entendit qu’on massacroit, ayant levé son esprit à Dieu, il conceut une certaine assurance d’en sortir, et d’en voir ung jour la justice, et desjà qui l’aura bien observée en aura veu beaucoup. Au contraire, le sr Raminy ne peut se promettre que mort, comme de fait, il fut meurtry le mercredy, 27e d’aoust, pensant sortir par la porte St Honoré pour le suivre.
Ce mesme temps, j’estois à Paris, il y avoit deux ans, empeschée avec feu madamoyselle de la Borde, ma mère, mes frères, ma sœur de Vaucelas, à faire partaige de la succession de feu monsr de la Borde, mon père, qui estoit mort le 15e d’aoust 1570, au mesme temps que la paix[1] fut faiste des derniers troubles qui précédèrent le massacre. Feu mon père en son jeune aâge avoit estudié, et depuis voyagé en Italie et Allemaigne. Je luy ay oüy dire qu’à Strasbourg il avoit ouy quelques presches, et veu disputer maitre Martin Luther et quelques autres docteurs. Là il avoit apris les abus de l’Eglize Romaine, mais non esté instruit en la vraye Religion. Il revint à Paris, trouver Dame Magdeleine Desfeugeraiz sa mère, et depuis ne pensa plus de s’instruyre en la religion, mais seulement luy fut parlé de se marier et avoir quelques[2] estatz. Peu de temps après, il fut marié à Dame Magdelaine Chevalier, ma mère, de laquelle il eut plusieurs enfans, et eut estât de Prési-