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court, se employa si bien que ses bénéfices furent donnés par le feu Roy Henry à feu monsieur Disgue, chancelier de la Royne[1] Eléonor d’Austriche en leur faveur, lequel estoit leur oncle maternel, en espérance qu’ilz retomberoient ès mains du dit Philippes ; mais estant aâgé près de quatre vingts ans, à l’heure mesmes le sieur d’Estrée, grand maistre de l’artillerie, en demanda la réserve au roy Henry 2, tellement que, venant à mourir deux ans après sans les résigner au proffit de ses petitz nepveux, ilz furent hors de leur maison, dont Dieu leur a fait évidemment miséricorde, car estant depuis avenus à la congnoissance de la vraye religion, ce leur eust esté ung grand empeschement pour s’en déclarer, et en faire profession ouverte, comme ilz font, par la grâce de Dieu. A la mort de feu monsieur le Doyen, monsieur du Plessis avoit près de sept ans, et estoit lors entre les mains de madame Gabriel Prestat de Sedane en Brye qui lui aprenoit, sans en faire semblant, les principes de la vraye religion dont il avoit congnoissance. Et ne luy en parloit touteffois aucunement, tant pour son bas aâge que par la crainte de monsieur de Buhy qui ignoroit que son précepteur feust luthérien (comme on les nommoit lors) ; mais c’estoit mademoiselle de Buhy sa mère qui avoit mis paine par le moyen de monsieur Morel, homme docte et réputé de ce temps là, de le recouvrer, affin qu’il commenceast d’heure à instruyre ses enfans en la crainte de Dieu ; il avoit sous sa charge, Pierre de Mornay et Philippes de Mornay ses deux filz ; les au-

  1. Éléonore d’Autriche, sœur de Charles-Quint, veuve de François Ier ; elle mourut à Talaveyra, près de Badajoz, en 1558.