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Aussy que d’ailleurs les Lansquenetz avoient été mal traitez en leur payement (encor qu’il est certain que le sr de Temple, lors malade, n’y participoit point), et les habitans de la religion opprimez des guerres passées estoient bien ayses d’avoir un abry, soubs une personne de mesme profession. Ceste nouvelle faisoit croire aux personnes de peu de jugement qu’il y avoit du dessein du Roy, voulant establir ceux de la religion réformée par ces voies obliques, et donnoit subject à d’autres plus fins qui n’en croioient rien, mais qui désiroient choses nouvelles, de troubler les affaires de S. M. soubs ce prétexte. Tellement que les choses tendoient à un grand mal, les principaux du conseil ayans protesté au Roy que les catholiques n’auroient point de satisffaction s’il ne faisoit trancher la teste du sr de Belesbat, Sa Majesté aussy que, s’il luy donnoit la pene d’y aller, il la luy cousteroit ; et de ce pas, néantmoins, tournoit la teste de son armée qui estoit vers Gisors, droict au Pont de l’arche pour y prendre l’artillerie qui y estoit demeurée et marcher droict à luy. Monsieur du Plessis, le Roy se plaignant de cest acte, ne le trouvoit moins estrange, mais remonstroit à Sa Majesté que la présence[1] des souverains ne se devoit emploïer qu’aux cas extrêmes, qu’il avoit affaire à un homme de qui les actions n’avoient point de mesure, qu’il valoit partant mieux le faire sonder premièrement, afin qu’il ne fust dit qu’un serviteur sy privé de sa personne luy fist un refus.

  1. L’édition de M. Auguis, au contraire des deux manuscrits, porte : « La puissance des souverains, » ce qui n’a point de sens.