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gentilhomme, enseigne de la compaignie de monseigneur le Prince de Condé, qui fut cause en partie de ce bonheur pour la connoissance qu’il avoit des hommes du pais.

Pendant ce siége de Rouen[1] qui fut long et traversé de plusieurs grandz accidens, sa compagnie fut logée en un grand bourg nommé Boulehart, sur le chemin de Diepe, faisant front contre la garnison de Fescamp ; mais il eut commandement du Roy de loger près de sa personne à Dernetal, pour le servir à toutes occurences, et spécialement aux affaires plus importans. En ce temps vint le sieur de Grammont[2] trouver le Roy, soubs ombre de voir le conte de Guiche, son nepveu, et luy porta parole du duc de Maine qu’il ne désiroit rien tant que la paix, qu’il ne seroit jamais subject d’autre que de luy, qu’il ne luy demanderoit chose qui déchirast l’Estat, ny préjudiciast à son aucthorité, et autres bons propos, mais qu’estant résolu d’y disposer les choses et les personnes à ceste fin, qui autrement pour l’heure estoient trop crues, il estoit nécessaire que cela fust secret, et pourtant[3] le supplioit de ne s’en ouvrir à personne, ce qui fut ; et n’en communiqua Sa Majesté qu’à monsieur le mareschal de Biron et à monsieur du Plessis, avec l’advis desquelz il fit de fort gracieuses responces au dit sr de Grammont qui estoient pour produire quelque fruict, sans le voyage que fit monsieur du Plessis en Angleterre, (avec le-

  1. Le siège de Rouen dura de 1590 à mai 1592 ; le duc de Parme réussit enfin à le faire lever.
  2. Frère du cardinal de Grammont.
  3. Pourtant pour partant.