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se voient par les lettres que le Roy de Navarre luy escrivoit, et luy au Roy de Navarre, fort particulières sur ce subject ; jusques là que[1] persuadant au Roy de Navarre qu’il estoit trompé et que c’estoit bayes de court, il traicta avec un capitaine Pol, lieutenant du sr de Lessart, gouverneur à Saumur, lequel moiennant huit mil escus luy devoit livrer la place, et prétendoit l’attraper et les siens soubs ombre de bonne foy, ce que monsr du Plessis rompit à temps à Gonnor, arrivant comme on estoit prest de marcher pour l’exécution, remonstrant qu’il attireroit sur luy la malédiction de la France et qu’il perdoit ses affaires de gayeté de cœur, aymant mieux jouir par force de ceste ville de passage qu’avec la bonne grâce du Roy qui l’appelloit et l’introduisoit dedans la France. Monsieur de Buhy servit infiniment de l’autre part à oster toute déffiance au Roy et à le faire entrer en confiance du secours du Roy de Navarre, alléguant tantost les uns qu’il estoit trop offensé pour le vouloir, tantost les autres qu’il estoit trop foible pour le pouvoir. Tant y a que le 15 apvril 1589, monsieur du Plessis entra à Saumur et y introduit la garnison prise du régiment du sr de Preaux fort paisiblement, ayant baillé son obligation pour le Roy de Navarre aux srs de Lessart et de l’Estelle de la somme de huit mil escus qu’il leur a fait payer depuis, alléguans iceux qu’elle leur estoit mieux deue qu’à ce capitaine Pol auquel le Roy de Navarre l’avoit promise. Et fut receu son serment à

  1. Le manuscrit de la Bibliothèque impériale et l’édition de M. Auguis portent : « Jusques-là que plusieurs persuadant au roi… »