Page:Madame de Mornay - Memoires - tome 1.djvu/175

Cette page a été validée par deux contributeurs.

doute eussent esté emportées sy l’ennemy en eust connu l’estat et les eust voulu tant soit peu opiniastrer. Une occasion tirant l’autre, il fut plus de quinze mois au dit lieu de Montauban, où j’estoy et notre famille, pendant lesquelz, pour ne citer les choses par le menu, furent achevées par sa sollicitation les fortifications de la nouvelle ville, la ville Bourbon mise en défense, édifiée de nouveau, et le fauxbourg de Tarn transporté dedans. Il mit plusieurs fois le canon dehors pour nettoyer les bicoques qui tenoient la ville subjette, toujours avec bon succez, et quelquefois avec des marques d’une spéciale grâce de Dieu. Il ravitailla la ville du Maz de Verdun de toutes sortes de vivres et munitions par trois fois. Il passa en Gascoigne et ayant esmeu M. de Fontrailles qui commandoit en Armagnac, délivrèrent ensemble la ville de l’Isle en Jourdain, blocquée de neuf fortz, avec une incroïable diligence, qui n’avoit plus à manger que pour six jours ; repassa soudainement à Montauban et s’alla jetter à temps dedans Villemur, où commandoit M. de Reniez, place au jugement de tous non défendable et nullement fortifiée, où il fut assisté des sieurs de Savaillan et de Suz avec bon nombre de gentizhommes, et arresta le cours des prospéritez du feu Duc de Joyeuse qui ne le menaçoit pas de peu. Mesmes fit ce qu’il peut là dedans pour secourir Salvaignac, comme chacun scait qu’il se pouvoit sy on l’eust secondé. Et diray une particularité là dessus que le Roy de Navarre, le trouvant estrange, luy manda qu’il louoit sa bonne affection, et touteffois ne pouvoit qu’il ne le blamast d’avoir choisy un sy mauvais vaisseau. Mais