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tout ce que dessus, afin qu’il y pourvust. Il s’y en alla en poste, et rencontra en chemin le Sr de Lansac, grand monopoleur[1] du Roy d’Hespagne en France, qui depuis a confessé à monsieur du Plessis avoir esté sur le point de luy faire un mauvais tour. Arrivé fut ouy du Roy patiemment et secrètement, et commencea par ceste préface qu’il scavoit bien que ce qui luy viendroit des Huguenotz luy seroit suspect, mais qu’il le supplioit de croire que ce n’estoit pas chose incompatible d’estre bon Huguenot et bon François tout ensemble. Et est certain que le Roy fut esmeu de ces adviz, jusques à luy dire qu’il estoit le premier qui luy avoit donné lumière à ses affaires. De faict il commanda mille dépesches pour y remédier, fit attraper les engins qui estoient préparés pour celle d’Arles, changea le gouvernement de Briançon en Dauphiné, pensa avoir pourvu à Orléans, etc. Mesmes luy fit cest honneur de luy demander quel ordre il pensoit pouvoir estre donné à un sy grand affaire ; sur quoy, il eut la hardiesse de luy respondre qu’autreffois avoit on fait prendre des mareschaux de France qui ne pouvoient pas tant nuire et qui ne l’avoient pas sy bien mérité que ceux de Lorraine. Mais ce qui le fit peu espérer fut qu’il luy commenda de communiquer tout à la Royne, sa mère, et sur ce qu’il en fit difficulté, le mena luy mesmes parler à elle. Vint aussy Monseigneur[2] abruptement en court, auquel le Roy parla, et toutes ses dépesches estoient concertées avec le Sr de Villeroy, secrétaire d’Estat. Aussy en vint la nouvelle bien

  1. Meneur d’intrigues.
  2. Le duc d’Alençon.