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AMUSANTES.

Je la fuis pourtant, me répondit-elle avec vivacité : vous n’êtes point ce que vous croyez être : Roſemonde n’étoit point votre mere, & tous ſes ſecrets ſont en mon pouvoir. Seigneur, puiſqu’il faut vous parler ſans feinte, je vous aime, je puis vous rendre un ſervice important ; mais ce ne ſera qu’à condition que vous partagerez votre ſort avec moi, je vous donne huit-jours pour y penſer : ſongez pendant ce tems que je puis vous rendre une naiſſance illuſtre, des biens immenſes, & un ſort des plus heureux ; & que ſi vous me refuſez, je mourrai avec votre ſecret.

Elle me quitta en achevant ces mots, & me laiſſa dans un embarras difficile à comprendre : j’y trouvois une ombre de vérité, qui me frapoit par le peu de tendreſſe que j’avois toujours eu pour Roſemonde ; mais les conditions que Fatime m’impoſoit, me paroiſſoient encore plus rudes que l’obſcurité qu’elle répandoit ſur ma naiſſançe. Cependant le caractère de ces ſortes de gens que la violence rend capables de tout, me fit réſoudre à l’adoucir.

Je fus huit-jours & huit-nuits à me déterminer ſur la réponſe que j’avois à lui faire, & jamais incertitude ne fût plus terrible que la mienne. Enfin je pris ma réſolution, & je revins trouver Fatime, à laquelle je dis que j’étois prêt à faire ce qu’elle ſouhaitoit, que j’allois lui donner un écrit ſigné de ma main, pourvu qu’elle ne m’en impoſât point, &