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AMUSANTES.

cœur ſe trouvant ſoulagé d’un fardeau ſi peſant, elle mourut plus tranquille qu’elle n’avoit vécu, & dans les ſentimens d’une grande piété.

Le procédé d’Arimon me parut ſi généreux, que je voulus qu’il me ſuivit chez moi, après les derniers devoirs qu’il devoit à ſa mere ; deſirant le préſenter à Philimene, qui s’étoit retirée depuis quelque tems chez les Vierges voilées qui avoient élevé Julie, qu’elle avoit confiée à mes ſoins & à ma tendreſſe. Elle le reçut avec l’applaudiſſement que méritoit l’action qu’il venoit de faire, & nous prîmes pour lui une eſtime à laquelle il ne donne pas occaſion de repentir.

Munie de l’acte de la déclaration de ſa mere, je me trouvai paiſible dépoſitaire des biens d’Orſame. Nous ſimes écrire aux Indes. Il n’y eut ni Gouverneur, ni Commandant de Place, qui ne fût inſtruit du nom de la Gouvernante, & de celui d’Orſame qui devoit avoir alors près de ſeize ans ; mais nous n’en pûmes rien découvrir.

Nous en avons paſſé ſix depuis dans la même incertitude, lorſque le hazard, ou plutôt le Ciel nous l’a rendu contre toute apparence & contre notre eſpoir.

Mais, continua Béliſe, la nuit me paroit avancée, la ſuite de mon récit pourroit nous mener encore loin ; & comme mon deſſein eſt de vous inſtruire ſans vous ennuyer, je crois qu’il vaut mieux la remettre à demain.