Page:Madame de Gomez Les journées amusantes Tome 1 1754.djvu/36

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
20
LES JOURNÉES

Voilà, ſage Béliſe, par où je finis mon diſcours, dont je craignois tort que la longueur n’eût ennuyé votre illuſtre Société. Mais Orophane, que ſes mœurs rendent ſi digne de l’eſtime que vous avez pour lui, me flatta agréablement, en m’aſſurant au nom de la Compagnie, qu’elle étoit toute de mon ſentiment. La charmante Julie, par un préjugé d’éducation, n’oſa m’aplaudir hautement ; mais un de ſes regards enchanteurs qu’elle ſait lancer ſi à propos, m’aſſura de ſon approbation : le ſeul Danton reſta dans ſon opinion, & me fit connoître qu’il me regardoit moi-même comme une perſonne dont le commerce étoit dangereux ; il ſe retira avec un dépit qui nous divertit un moment.

Nous fîmes encore quelques réflexions ſur ce que j’avois dit, & nous nous ſéparâmes en regrettant fort la longueur de votre abſence. Julie ſe chargea de vous écrire cette converſation ; & comme je n’attendois pas que vous vouluſſiez la ſavoir de moi, je ne m’occupois que du ſoin de vous aſſurer que perſonne ici n’a plus d’impatience de votre retour, que votre fidelle URANIE.

À peine Uranie eut-elle achevé de lire, qu’elle reçut un applaudiſſement général. Mais Thélamon la regardant avec des yeux où ſon amour étoit peint : En vérité, lui dit-il, il faut avouer que vous êtes bien coupable de m’avoir privé ſi long-tems du plaiſir que je viens de partager avec la Compagnie ; mais