nous, qui fut aſſez vive : & quelqu’un de la compagnie l’ayant écrite à Beliſe, elle me manda que pour la conſoler de n’être pas témoin de nos amuſemens, il falloit que je lui écriviſſe, mot à mot, la querelle que j’avois eue avec Damon. Sollicitée d’ailleurs par Orophane & Félicie, qui craignoient, diſoient-ils, d’oublier la plûpart des choſes que j’avois dites, je me vis forcée à faire une eſpéce d’ouvrage d’un diſcours que j’avois cru indifférent. Le voici, ajouta-t-elle, & je ſouhaite qu’il ne vous faſſe pas repentir de votre curioſité.
Lettre en forme de Diſſertation,
sur l’Amour.
VOus voulez, ſage Béliſe, que je mette
ſur le papier, ce que je dîs chez vous l’autre
jour en faveur de l’Amour. Quel éloge
pour ce Dieu, & quel eſpoir pour le gain de
ma cauſe contre cet homme, ſorti ſans-doute
des plus affreux deſerts de l’Afrique ! Votre
rare vertu donne un grand poids à ce que
je ſoutiens, puiſque vous voulez bien avouer
que vous auriez aimé plus tendrement qu’une
autre, ſi vous aviez trouvé un objet digne
de vos ſentimens ; il n’en faut pas davantage
pour remporter la victoire ſur mon adverſaire.