Page:Macrobe (Œuvres complètes), Varron (De la langue latine) Pomponius Méla (Œuvres complètes), avec la traduction en français, 1863.djvu/47

Cette page n’a pas encore été corrigée

ciel en terre. La voie lactée embrasse tellement le zodiaque dans la route oblique qu’elle a dans les cieux, qu’elle le coupe en deux points, au Cancer et au Capricorne, qui donnent leur nom aux deux tropiques. Les physiciens nomment ces deux signes les portes du soleil, parce que, dans l’un et l’autre, les points solsticiaux limitent le cours de cet astre, qui revient sur ses pas dans l’écliptique, et ne la dépasse jamais. C’est, dit-on, par ces portes que les âmes descendent du ciel sur la terre, et remontent de la terre vers le ciel. On appelle l’une la porte des hommes, et l’autre la porte des dieux. C’est par celle des hommes, ou par le Cancer, que sortent les âmes qui font route vers la terre ; c’est par le Capricorne, ou porte des dieux, que remontent les âmes vers le siège de leur propre immortalité, et qu’elles vont se placer au nombre des dieux ; et c’est ce qu’Homère a voulu figurer dans la description de l’antre d’Ithaque. C’est pourquoi Pythagore pense que c’est de la voie lactée que part la descente vers l’empire de Pluton, parce que les âmes, en tombant de là, paraissent déjà déchues d’une partie de leurs célestes attributs. Le lait, dit-il, est le premier aliment des nouveau-nés, parce que c’est de la zone de lait que les âmes reçoivent la première impulsion qui les pousse vers les corps terrestres. Aussi le premier Africain dit-il au jeune Scipion, en parlant des âmes des bienheureux, et en lui montrant la voie lactée : « Ces âmes sont parties de ce lieu, et c’est dans ce lieu qu’elles reviennent. » Ainsi celles qui doivent descendre, tant qu’elles sont au Cancer, n’ont pas encore quitté la voie de lait, et conséquemment sont encore au nombre des dieux ; mais lorsqu’elles sont descendues jusqu’au Lion, c’est alors qu’elles font l’apprentissage de leur condition future. Là commence le noviciat du nouveau mode d’existence auquel va les assujettir la nature humaine. Or le Verseau, diamétralement opposé au Lion, se couche lorsque celui-ci se lève ; de là est venu l’usage de sacrifier aux mânes quand le soleil entre au premier de ces signes, regardé comme l’ennemi de la vie humaine. Ainsi l’âme, descendant des limites célestes, où le zodiaque et la voie lactée se touchent, quitte aussitôt sa forme sphérique, qui est celle de la nature divine, pour s’allonger et s’évaser en cône ; c’est comme le point qui décrit une ligne, et perd, en se prolongeant, son caractère d’individualité : il était l’emblème de la monade, il devient, par son extension, celui de la dyade. C’est là cette essence à qui Platon, dans le Timée, donne les noms d’indivisible et de divisible, lorsqu’il parle de la formation de l’âme du monde. Car les âmes, tant celle du monde que celle de l’homme, se trouvent n’être pas susceptibles de division, quand on n’envisage que la simplicité de leur nature divine ; mais aussi quelquefois elles en paraissent susceptibles, lorsqu’elles s’étendent et se partagent, l’une dans le corps du monde, l’autre dans celui de l’homme. Lors donc que l’âme est entraînée vers le corps, dès l’instant où elle se prolonge hors de sa sphère originelle, elle commencée éprouver le désordre qui règne dans la matière. C’est ce qu’a insinué Platon dans son Phédon, lorsqu’il nous peint l’âme que l’ivresse fait chanceler, lorsqu’elle est entraînée vers le corps. Il entend par là ce nouveau breuvage de matière plus grossière qui l’oppresse et l’appesantit. Nous avons un symbole de