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Chap. I. Différence et conformité entre la République de Platon et celle de Cicéron. Pourquoi ils ont inséré dans ces traités, le premier, l’épisode de la révélation d’Her ; le second, celui du Songe de Scipion.

Eustathe, mon cher fils, qui faites le charme et la gloire de ma vie, vous savez quelle différence nous avons d’abord remarquée entre les deux traités de la République, incontestablement écrits, l’un par Platon, l’autre par Cicéron. Le gouvernement du premier est idéal, celui du second est effectif ; Platon discute des institutions spéculatives, et Cicéron celles de l’ancienne Rome. Il est cependant un point où l’imitation établit entre ces deux ouvrages une conformité bien marquée. Platon, sur la fin de son livre, rappelle à la vie, qu’il semblait avoir perdue, un personnage dont il emprunte l’organe pour nous révéler l’état des âmes dégagées de leurs corps, et pour nous donner, des sphères célestes ou des astres, une description liée à son système : Cicéron prête à Scipion un songe pendant lequel ce héros reçoit des communications du même genre. Mais pourquoi tous deux ont-ils jugé nécessaire d’admettre de pareilles fictions dans des écrits consacrés à la politique, et d’allier aux lois faites pour régir les sociétés humaines, celles qui déterminent ! a marche des planètes dans leurs orbites, et le cours des étoiles fixes, entraînées avec le ciel dans un mouvement commun ? Leur intention, qu’il me semble intéressant de connaître, et cet intérêt sera sans doute partagé, absoudra deux éminents philosophes, inspirés par la Divinité dans la recherche de la vérité ; les absoudra, dis-je, du reproche d’avoir ajouté un hors-d’œuvre à des productions aussi parfaites. Nous allons d’abord exposer en peu de mots le but de la fiction de Platon ; ce sera faire connaître celui du Songe de Scipion.

Observateur profond de la nature et du mobile des actions humaines, Platon ne perd jamais l’occasion, dans les divers règlements qui forment le code de sa République, d’imprégner nos cœurs de l’amour de la justice, sans laquelle non seulement un grand État, mais une réunion d’hommes peu nombreuse, mais la plus petite famille même, ne saurait subsister. Il jugea donc que le moyen le plus efficace de nous inspirer cet amour du juste était de nous persuader que nous en recueillerions les fruits au delà même du