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autre genre que la leur, on n’a guère à lutter que contre l’ambition des grands et l’insolence des peuples ; mais que les Empereurs romains avaient en outre un troisième obstacle à surmonter, savoir, la cruauté et l’avarice des soldats : ce qui était si difficile (1), que plusieurs y échouèrent. Il n’est pas facile en effet de contenter à-la-fois les soldats et le peuple, parce que les peuples aiment le repos, et pour cela même les Princes dont l’ambition est modérée (2) ; tandis que les soldats veulent un Prince qui ait l’esprit militaire et qui soit insolent, cruel et rapace[1]. La volonté de ceux de l’em-

(1) Je ne le sais que trop.

R. I.

(2) Mon embarras est extrême ; et ce n’est pas à moi qu’il faut imputer mon ambition guerrière, mais à mes soldats, à mes généraux, qui m’en font un besoin de première nécessité. Ils me tueraient si je les laissais plus de deux ans sans leur présenter l’appât d’une guerre. R. I.

  1. « Il y en avait que la mémoire de Néron, et le désir du retour de l’ancienne licence enflammaient », dit Tacite : erant quos memoria Neronis, ac desiderium prioris licensiæ accenderet (Tacite Hist. 1). Galba perdit l’empire et la vie pour avoir dit qu’il ne prétendait point acheter l’affection des soldats, mais prendre leurs personnes : legi à se milites, non emi (Hist. 1) ; comme encore pour voir usé d’une sévérité de discipline que Néron avait laissé perdre dans la licence : Nocuit antiquus rigor, et nimia severitas cui jam pares non sumus… Severitas ejus angebat coaspernantes veterem disciplinam, atque ita quatuordecim annis à Nerone assuefactos, ut haud minus vitia principum amarent quam olim virtutes verebantur (Hist. 1).