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que les citoyens ont besoin de l’état, parce qu’alors chacun court, chacun promet, chacun veut mourir pour lui, attendu que la mort est éloignée (1). Mais dans les temps de crise, lorsque l’état a besain des citoyens, il ne s’en trouve que bien peu[1].

Cette expérience est d’autant plus périlleuse, qu’on ne la prue faire qu’une seule fois (2) ; en conséquence un prince sage doit imaginer un mode, au moyen duquel ses sujets ayent toujours, et de toutes les manières, dans toutes les circonstances quelles qu’elles soient, un très-grand besoin de sa principauté (3). C’est le plus sûr expédient pour se les rendre à jamais fidèles.

(1) Voilà ce qu’ils n’entrevoient pas dans ces protestations, ces adresses qui les tranquillisent : ils ne savent donc pas encore comme cela se fait ! E.

(2) S’ils s’en tiraient bien une première fois, je prendrais donc ma revanche avec avantage, quand je pourrais la prendre, ou la faire prendre. E.

(3) On ne pense jamais assez à cette vérité là. E.

  1. Prosperis Vitellii ebus certaturi ad obsequium, adversam ejus fortunam ex æquo detrectabant. « Tous s’empressaient de servir Vuellius quand ses affaires étaient heureuses ; et ils le desservirent à l’envi quand la fortune lui devint contraire ». (Tacit. Hist. 2) — Languentibus omnium studiis, qui primo alacres fidem atque animum ostentaverant ; etc. : « tous ceux qui avaient d’abord fait parade d’un courageux dévouement, n’eurent plus qu’une languissante indifférence pour lui, etc. » (idem, Hist. i.)