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Vie


de
Castruccio Castracani
de Lucques




Avertissement



Toujours admirée comme composition littéraire, la vie de Castruccio a donné lieu à de très vives critiques comme morceau d’histoire. Leibniz, en la comparant avec la Cyropédie, prétend que Machiavel a voulu donner dans Castruccio l’idée d’un prince telle qu’il se l’était formée dans son traité del Principe. D’autres ont prétendu que, pour se venger du mal que le célèbre condottiere avait fait à Florence, Machiavel avait eu recours à la fiction, dans l’espoir qu’il réussirait, en cachant la vérité sous des mensonges, à obscurcir la gloire de son héros, et à rendre suspecte la foi des écrivains qui entreprendraient à l’avenir de retracer l’histoire de ce vaillant soldat. C’est, nous le pensons, prêter à Machiavel plus de machiavélisme qu’il ne pouvait en concevoir lui-même. Il nous paraît plus simple de croire que le secrétaire florentin a voulu écrire une composition brillante, dans laquelle en donnant carrière à son imagination, il s’est plu à créer un type calqué, d’une manière plus ou moins exacte, sur un personnage réel, en d’autres termes, qu’il n’a voulu faire qu’un roman historique. Cette opinion, à laquelle nous souscrivons entièrement, a été développée avec beaucoup de netteté par le comte Algarotti, qui dit expressément : « Les critiques prétendent qu’en écrivant la vie de Castruccio le secrétaire s’est servi seulement du canevas que lui présentait l’histoire, qu’il l’a ensuite brodé à sa fantaisie, et qu’il avait pris à tâche de faire pour Castruccio ce que Xénophon avait fait pour Cyrus. Ce qui prouve en effet que tel a été son but, ce sont quelques réparties des anciens qu’il lui met dans la bouche, et l’espèce de contradiction que présente l’exposition