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ACTE CINQUIÈME

SCÈNE PREMIÈRE.
DORIA, seule.

Je n’ai jamais ri de si bon cœur, et je crois que je ne rirai jamais autant. Ici nous n’avons fait autre chose que rire toute la nuit : Sofronia, Sostrata, Cléandre, Eustazio, chacun riait. On a passé le temps à compter les minutes, et nous disions : Maintenant Nicomaque entre dans la chambre ; maintenant il se déshabille ; maintenant il se couche auprès de la mariée ; maintenant il lui livre bataille ; maintenant il est vigoureusement repoussé. Pendant que nous plaisantions ainsi, Siro et Pirro sont entrés, et notre rire a redoublé ; mais ce qu’il y avait de plus beau à voir, c’était Pirro qui riait plus encore que Siro : aussi je ne crois pas qu’aucun de nous puisse éprouver cette année un plaisir plus vif et plus complet. Comme il est déjà grand jour, ces dames m’ont envoyée à la découverte pour voir ce que fait Nicomaque, et la manière dont il supporte son malheur. Mais le voici qui sort avec Damon. Je veux me tenir à l’écart pour les entendre, et trouver matière à rire de nouveau.

SCÈNE II.
DAMON, NICOMAQUE, DORIA, cachée.
DAMON.

Qu’est-il arrivé cette nuit ? comment la chose s’est-elle passée ? Tu ne dis mot. Quel remue-ménage avez-vous donc fait, en vous habillant, en ouvrant les portes, en montant et en descendant du lit ? Vous n’êtes pas restés une minute en repos. Moi, qui étais couché au rez-de-chaussée au-dessous de vous, je n’ai pu fermer l’œil ; je me suis levé tout dépité ; et je te trouve sortant, la mine toute renversée. Tu ne parles pas, tu sembles mort ; que diable as-tu ?