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DU VOIR-DIT.

CHANSON BALADÉE.[App. XII.]

L’ueil qui eſt le droit archier
D’Amours, pour traire & lancier
Mignotement,
N’a pas péu bonnement
Mon cuer blecier ;
Et s’aim’ de fin cuer entier
Tres-loiaument.

Veſ-ci pour quoy vraiement :
Onques ne vi le corps gent,
Cointe & legier
De celle qui liement
Me tient & joliement
En ſon dangier :
Ne il moi ; mais l’ay tant chier,
Que jamais faire n’en quier
Departement.
Il puet bien crueuſement
Moi menacier ;
Mais ne le priſe un denier,
Quant à preſent.
L’ueil qui eſt le droit archier…

Qu’onques ne me fiſt preſent
De joie ne de tourment ;
Ne empechier
Ne me porroit nullement
À vivre joieuſement
Son menacier.
Envis ne puis l’aprochier,
N’il moi, fors par ſouhaidier ;
Pour ce, ſouvent,
Mon amoureus penſement
Me fait cuidier
Qu’il me doie treſpercier