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XVI INTRODUCTION

s'impatienter (v. 32o5). Enfin, pour conclure, Guil- laume, par son propre exemple, montre, non sans une pointe de malice, l'obéissance aveugle que l'amant doit à sa dame et la contenance qu'il prendra devant son indifférence ou réelle ou feinte (v. 4217 ss.J.

On le voit, c'est bien un « Art d'amour » que Machaut a voulu écrire dans ce poème, ou tout au moins s'est-il proposé de développer certains points des théories émi- ses sur l'amour à son époque. Il avait déjà fait un essai de ce genre dans la première de ses œuvres, dans le Dit dou Vergier; mais là il avait servilement suivi les don- nées du Roman de la Rose. Dans le Remède de Fortune par contre, il a conquis son indépendance et il pré- sente d'une manière personnelle et assez originale les vieux thèmes amoureux, si souvent déjà traités avant lui, mais dont les contemporains, semble-t-il, ne pouvaient se rassasier.

Si large que soit la place accordée à ce sujet, ce n'est cependant pas lui qui, dans notre poème, tient le rôle principal. Ce que Machaut se propose de dire en pre- mière ligne, le titre de l'ouvrage nous l'indique : après tant d'autres, Guillaume veut essayer à son tour d'ex- pliquer la fonction étrange, troublante et inquiétante de « dame Fortune » et énoncer les moyens qui permettent de supporter les coups dont elle se plaît à frapper les humains. Quelques dizaines d'années après le Remède de Fortune, l'auteur anonyme des Règles de seconde rhétorique fait remarquer à propos de Fortune, que « pluseurs poètes ont close sur cestc matière, pour ce que tousjours ara son cours » '. Et en effet, les poèmes et les traités relatifs à ce sujet pullulent littéralement, surtout depuis la fin du xin e siècle, dans la littérature française parmi les contemporains plus ou moins rap- prochés de Machaut.

1. E. Langlois, Recueils d'Arts de seconde rhétorique, p. 40.

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