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VIII INTRODUCTION

main. On reconnaît là très exactement les traits essentiels de la « carole » des xm e et xiv" siècles '.

Plus tard, quand est venue l'heure de rentrer, dames et seigneurs s'en retournent au château en causant. Des « partures d'amours et de ses aventures » (3879-80), c'est-à-dire la discussion de sujets amou- reux, font, d'après Guillaume, les principaux frais de la conversation. On entend ensuite la messe en une cha- pelle peinte « d'or et des plus fines couleurs » (v. 3892- 93). Aussitôt après, selon la coutume, un chambellan, d'un signal de trompette, donne Tordre de préparer le repas 2 . D'une manière bien vivante, comme nous ne l'avons rencontrée dans aucun autre texte du moyen âge, le poète nous fait assister au remue-ménage qui s'ensuit : on voit les serviteurs se précipiter vers les différents offices, la « paneterie », la « bouteillerie », la « cuisine », les « messagers et garçons d'étables » dresser « formes, tréteaux et tables », les « valets tranchants » faire leur toilette et s'occuper de leurs maîtres, tout cela avec force bousculades et à grand renfort de cris dans toutes les langues de la chrétienté. Les seigneurs, entre temps, ont enlevé le « corset », pour revêtir le « surcot ouvert 3 ». et on se retrouve dans la grande

��demi-tour. Donc, de vis-à-vis qu'elle devait être, elle s'est rappro- chée, après avoir parcouru la moitié du cercle des danseurs.

1. La description de Machaut se rapproche et complète la scène connue décrite par Froissart dans la Prison amoureuse (v. 358 ss.). On y danse également la carole en se tenant par la main et en chantant, chacun à son tour, des virelais. Comp. aussi la descrip- tion de Jean Maillart dans le Comte d'Anjou (Hist. litt. de la France, xxxi, 335-6). Pour d'autres descriptions et citations, voy. Pfuhl, LJntersuchungen ùber die Rondeaux und Virelais (1887), p. 43 ss. et Jeanroy, Orig. de la poésie lyrique en France (2 e Ed., 1904), p. 3go et 52b.

2. C'est le signal bien connu des romans en vers du moyen âge qu'on appelait « corner l'eau » ; l'expression paraît au v. 3942

3. Voy. YHist. de France de Lavisse, t. III 2, p. 33, note 1.

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