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LXIV INTRODUCTION


criptions entraînent l′auteur parfois trop loin et entravent le développement régulier de l′action et de la discussion. Celle-ci même, un moment, semble vouloir dévier de son but : on abandonne la question fondamentale pour discuter cet autre problème, à savoir si l′amant trahi doit malgré cela rester fidèle à la dame volage. Mais Guillaume fait presque aussitôt constater cette digression par le juge, et il ramène l′entretien à son véritable sujet.

Ce sont sans doute moins les qualités que nous venons d′énumérer que Theureux choix du problème discuté, qui firent le grand succès de ce débat. Ce succès est attesté de différentes manières : c′est le seul dit de Machaut qui soit reproduit encore au xve siècle dans des manuscrits contenant un choix d′œuvres de différents auteurs ; Guillaume lui-même, dans le Jugement dou Roy de Navarre, reprend le débat sur la même question  ; au xve siècle, Christine de Pisan, dans le Dit de Poissy discute à peu près le même problème, et vers la même époque Martin le Franc déclare ne pas s′accorder au jugement de Machaut. Quant aux qualités de forme qu′on y rencontre, l′unité de l′action et la recherche de la vraisemblance qui, réunies, contribuent à donner au poème une allure presque dramatique, je ne crois pas que les contemporains et les imitateurs s′en soient beaucoup souciés.

IV. — Le Jugement dou Roy de Navarre.

Dans tous les manuscrits, le Jugement dou Roy de Navarre suit immédiatement le Jugement dou Roy de Behaingne. Chronologiquement, cependant, ils sont séparés l′un de l′autre par un intervalle de temps assez