Page:Machaut - Œuvres, éd. Hœpffner, I.djvu/50

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
XLII INTRODUCTION


poème à la justification et à la gloire du roi. Si d’ailleurs Machaut n’était pas directement en rapport avec Pierre lui-même, il connaissait au moins l’un ou l’autre de ses officiers et de ses serviteurs : il dit de Bermond de la Voulte, chevalier du Vivarais, chambellan du roi de Chypre, que chacun l’aimait et que lui, Machaut, l’aimait aussi[1] ; Perceval de Cologne, autre chambellan du roi, était, d’après notre auteur, bien connu à Paris[2] ce qui implique évidemment que Machaut le connaissait également. Tarbé et P. Paris ont émis l’hypothèse que le Dit de la Marguerite a été composé par Machaut pour le roi de Chypre, le premier rappelant que Pierre de Lusignan fit bâtir dans l’île de Chypre une maison de plaisance qu’il nomma La Marguerite[3], l’autre inscrivant cette note sur un manuscrit de Machaut, sans dire ses raisons. Mais aucun des poètes de l’époque n’a manqué de chanter la marguerite, Froissart aussi bien que Deschamps, unissant dans ce même nom l’éloge et de la fleur et de leur dame qui s’appelait ainsi ; Machaut lui-même, dans le Dit de la Fleur de Lis et de la Marguerite, traite une seconde fois ce sujet. Il n’y a donc là rien qui vise tout particulièrement le roi de Chypre. Mais dans le corps même du poème, il est dit qu’alors même que le poète est en Chypre ou en Égypte, son cœur continue à habiter en sa marguerite. Pierre de Lusignan pourrait, en effet, s’exprimer ainsi ; mais il nous semble que ce n’est là qu’un lieu commun de la poésie amoureuse, et l’on aurait tort d’attribuer à ces mots un sens plus précis et

  1. Prise d’Alexandrie, v. 3668.
  2. Ibid., V. 7612.
  3. Loc. cit., p. XXIX, n. i.