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XIV INTRODUCTION


Jean étant mort à Crécy en 1346, c′est en 1316 au plus tard qu′il aurait retenu Guillaume à ses gages. Mais l′affirmation de Machaut qui date des dernières années de sa vie et qui est postérieure à la mort de Jean de plus d′un quart de siècle, est formellement contredite par un document officiel, plus digne de confiance que le vers du poète[1]. En 1335, Jean de Luxembourg demande au pape Benoît XII la confirmation d′une prébende pour son serviteur qu′il a à son service depuis une douzaine d′années[2], donc depuis environ 1323. Il serait intéressant de savoir comment Guillaume fut mis en relation avec le roi de Bohême ; mais, en vérité, nous l′ignorons. Tant qu′on avait pu le croire d′abord au service de Philippe-le-Bel ou de sa femme, on pouvait admettre que Jean l′eût rencontré à la cour de France[3] Mais cette hypothèse s′applique à un autre personnage ; nous le savons aujourd′hui. Peut-être est-ce par l′entremise de l′Église que le roi entra en rapport avec le poète. Guillaume, en effet, à cette date, appartenait sans doute déjà au vaste monde ecclésiastique où, seul alors, toutes les ambitions pouvaient encore être satisfaites, où la valeur personnelle pouvait, jusqu′à un certain point, corriger les différences d′origine et permettre d′arriver même aux hommes de la plus basse condition, Machaut faisait partie du clergé du diocèse de Reims, où il était né.

  1. C′est probablement le souci de trouver un vers bien frappé et une rime facile qui est la cause de cette affirmation inexacte et exagérée du poète.
  2. A. Thomas, Romania, X, 332 : « … clerico suo secretario et familiari domestico quem asserit duodecim annis vel circa suis obsequiis institisse ». 3. C′est l′opinion de Tarbé et de Mas Latrie.
  3. C′est l′opinion de Tarbé et de Mas Latrie.