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          760 Ce fait Amour,[1]
Nom pas ma dame, en qui tout a valour ;[2]
Car elle fait son devoir et s’onnour[3]
D’obeïr a son souverein signour.[4]
          764 Si qu’il m’est vis,[5]
Quant par Amour d’amer estoie espris,[6]
Qu’en ce faisant Amours a plus mespris[7]
Par devers moy que ma dame de pris,
          768 C’est a entendre,
S’Amours pooit par devers moy mesprendre.[8]
Mais nullement je ne puis ce comprendre ;[9]
Car longuement, com douce mère et tendre,[10]
          772 M’a repeti
De ses dous biens au mieus qu’elle a peu,[11]
Ne je n’ay pas encor aperceû.
Pour nul meschief que j’aie receü,[12]
          776 Que tout adès
Elle ne m’ait com amie esté près
Et qu’el ne m’ait servi de tous mes mes,[13]
De plours devant et de souspirs après.[14]
          780 C’est ma viande ;
Mes appetis plus ne vuet ne demande,[15]
Ne, par m’ame, riens n’est a quoy je tende[16]
Fors seulement a ce que mes cuers fende.[17]
          784 Einsi Amour
Croist en mon cuer au fuer de ma dolour,
Ne ne s’en part, ne de nuit, ne de jour.[18]

  1. J amours
  2. CDEP tant ; KJ toute v.
  3. KJ Maint quelle ; E son désir
  4. FM souurein
  5. E auis
  6. M dame jestoie ; E estoit
  7. E Quay
  8. KJ entendre
  9. C puis recomprendre
  10. E mère tendre
  11. M ces
  12. KJ Par ; FM meschies ; D jai ; E apperceu
  13. BDCE elle ; KJ met
  14. D auant
  15. EKJP vueil
  16. C Ne ma vie rien nest ; E a qui jentende ; D a quoy entende
  17. KJ tende
  18. en manque dans E ; D a fuer de d.\ KJ cuer moult crueuse d.