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10 PROLOGUE


De vois délie, seinne et clere,
Loent en chantant Dieu le père,
Pour ce qu’en gloire les a mis
120 Com justes et parfais amis,
Et pour ç’aussi que de sa grâce
Le voient adès face a face.
Or ne puelent li saint chanter,
124 Qu’il n’ait musique en leur chanter ;
Donc est Musique en paradis.
David li prophètes jadis,
Quant il voloit apaisier l’ire
128 De Dieu, il acordoit sa lire,
Dont il harpoit si proprement
Et chantoit si dévotement
Hympnes, psautiers et orisons,
132 Einsi comme nous le lisons,
Que sa harpe a Dieu tant plaisoit
Et son chant qu’il se rapaisoit.

Orpheüs mist hors Erudice
136 D’enfer, la cointe, la faitice.
Par sa harpe et par son dous chant.
Cils poètes dont je vous chant
Harpoit si très joliement
140 Et si chantoit si doucement
Que les grans arbres s’abaissoient
Et les rivières retournoient
Pour li oïr et escouter,
144 Si qu’on doit croire sans doubter
Que ce sont miracles apertes[1]
Que Musique fait. C’est voir, certes.

Retorique versefier[2]
148 Fait l’amant et metrefier,

  1. Fsoit
  2. A F Théorique ; dans A corrigé en Retorique ;