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disputée hier avec son amoureux qui l’a injuriée ignoblement, et elle avait passé la nuit en larmes. Ce matin, elle s’est résolue à rompre, et elle est venue puiser ici la force nécessaire pour sortir des griffes du démon. Elle a commencé par bien prier, de tout cœur. Mais, peu à peu, j’ai vu que sa pensée déviait pour se reporter vers les premières délices. Parallèlement, les paroles tombaient, sans vie. Son oraison devint tiède, puis froide, puis inconsciente. Les lèvres, habituées aux oraisons, priaient. Mais l’âme que j’épiais, de là-haut, cette âme avait fui pour rejoindre l’autre. Enfin, elle s’est signée, s’est levée, et elle est partie sans rien demander.

— J’ai mieux que cela à t’offrir.

— Mieux que cela ? demanda saint Joseph, curieux.

— Beaucoup mieux, répondit saint François de Sales ; et mon histoire est moins triste que celle de cette pauvre âme, blessée du mal de la terre, et que la grâce céleste peut encore sauver. Et pourquoi ne sauverait-elle pas l’autre encore ? Enfin, voici de quoi il s’agit.

Tous se turent, inclinant leurs bustes, atten-