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qu’ils inventoriaient et commentaient les oraisons et les prières de cette journée. Chacun faisait sa remarque. Et tous, cruels psychologues, avaient pénétré dans l’âme et la vie des fidèles, et disséquaient les sentiments de chacun comme un anatomiste défibre un cadavre. Saint Jean-Baptiste et saint François de Paule, durs ascètes, se montraient parfois revêches et absolus. Il n’en était pas ainsi de saint François de Sales, qui écoutait et parlait avec la même indulgence dont est empreint son fameux livre de l’Introduction à la vie dévote.

C’est ainsi que, suivant le tempérament de chacun d’eux, ils allaient narrant et commentant. Ils avaient déjà compté des cas de foi sincère et sans mélange, d’autres d’indifférence, de dissimulation et de versatilité. Les deux ascètes étaient plus ou moins irrités, mais saint François de Sales leur rappelait le texte des écritures : « Il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus », voulant sans doute dire par là que tous ceux qui vont à l’église n’y apportent pas un cœur pur. Saint Jean branlait la tête.

— François de Sales, je t’affirme qu’il est en train de poindre en moi un sentiment étrange