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avait en ce monde beaucoup de choses mystérieuses et réelles. S’il n’y croyait pas, tant pis ! il n’en était pas moins vrai que la cartomancienne avait tout deviné. Quoi encore ? La meilleure preuve, c’est qu’elle était maintenant tranquille et rassérénée.

Elle pensait qu’il allait lui donner la réplique, mais il se retint, ne voulant pas lui enlever de ses illusions. D’ailleurs, dans son enfance, et même plus tard, il était demeuré superstitieusement emprisonné au milieu d’un arsenal de croyances que sa mère lui avait inculquées, et qui s’étaient évanouies vers sa vingtième année. Le jour qu’il laissa tomber toute cette végétation parasite, et qu’il ne resta plus que le tronc de la religion, il enveloppa, dans un même doute d’abord, puis dans une négation totale, ces deux enseignements qu’il avait reçus de sa mère. Camille ne croyait à rien. Pourquoi ? il n’aurait pu le dire, il ne possédait aucun argument, se limitant à tout nier. Et je m’exprime mal ; car nier, c’est encore affirmer, et il ne formulait pas son incrédulité. Devant le mystérieux, il se contenta de hausser les épaules et de passer son chemin.